Induction Humaniste “en ouverture”, par Baudelaire !

Ce jour-là, Baudelaire déprime sec.
Les femmes, bien sûr. L’argent, bien sûr. Et puis tous ces philistins qui ne comprennent rien à ses poèmes.

Mais, tout à coup, il se dit : “Bon sang, je me ferais bien une petite induction humaniste en élévation matérielle !”

Et hop, aussitôt dit, aussitôt fait :

Elévation

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,

Par-delà le soleil, par-delà les éthers,

Par-delà les confins des sphères étoilées,

Mon esprit, tu te meus avec agilité,

Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l onde,

Tu sillonnes gaiement l’immensité profonde

Avec une indicible et mâle volupté.

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ;

Va te purifier dans l’air supérieur,

Et bois, comme une pure et divine liqueur,

Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

Derrière les ennuis et les vastes chagrins

Qui chargent de leur poids l’existence brumeuse,

Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse

S’élancer vers les champs lumineux et sereins ;

Celui dont les pensées, comme des alouettes,

Vers les cieux le matin prennent un libre essor,

– Qui plane sur la vie, et comprends sans effort

Le langage des fleurs et des choses muettes

 Les Fleurs du Mal

elevation